Quoiqu’on fasse, un retour de voyage est toujours difficile. Encore plus si le voyage a été long et chouette. On l’a vécu et, heureusement, on a trouvé des solutions pour soigner notre retour et renouer avec la vie en France tout en douceur. Les voici !
- Mon expérience du retour de PVT
- La théorie : comprendre les étapes du retour de voyage
- Les techniques pour un retour adouci
- Questions pratiques pour un retour sans surprises
- Rien ne sert de courir : prenez le temps de l'adaptation
- Résumé : nos conseils pour bien vivre son retour de voyage
- Quelques ressources bien utiles pour digérer le retour
Et voilà, This is the end (de ton PVT) beautiful friend. Parmi toutes les bonnes choses, le voyage est probablement l’une de celles dont la fin est la plus abrupte : avec la rapidité de l’avion, vous êtes propulsé en quelques heures d’une vie de découverte et de liberté totale (le voyage, quoi) à un brusque retour arrière dans votre vie sédentaire. Et bam.
Mon expérience du retour de PVT
Pour ma part, le retour d’Argentine a été dur : en 20 h de vol escales comprises, je suis passée du soleil estival de Buenos Aires à l’hiver savoyard. C’était le 24 décembre, il faisait gris, j’étais assise entre mémé et mon père autour d’une raclette, et après le classique « alors, c’était bien ? » (auquel on répond généralement par un bref « ben, oui ! »), on a enchainé sur le sujet du moment, à savoir, le temps qu’il fait. Dans mon corps, apathie totale, dans ma tête, un lancinant « haaaaaaaaaaaaaaaaa ».
Tout ça pour vous dire que rentrer de voyage, c’est dur. Et vous ne pouvez pas échapper au choc du retour. La bonne nouvelle, c’est que les expériences des voyageurs montrent qu’il y a des moyens pour amortir le choc…
La théorie : comprendre les étapes du retour de voyage
D’abord, il faut comprendre ce que vous vivez. C’est tout à fait normal d’avoir besoin d’un temps d’adaptation à votre retour en France. Un article de l’université de Laval sur « Le choc du retour », écrit par le psychologue Marcel Bernier, distingue plusieurs phases dans le retour de voyage :
La préparation du retour
Vous n’êtes pas encore rentré que vous y pensez déjà : les proches que vous allez revoir, l’environnement que vous allez retrouver, la vie que vous allez (re)construire… Selon les gens et les périodes, cette anticipation du retour vous fait osciller entre joie (je vais revoir ma famille !), tristesse (vous quittez la vie que vous vous êtes construite pendant votre séjour à l’étranger), et angoisse de votre vie future.
L’arrivée : la lune de miel
A votre arrivée, vous pouvez avoir quelques jours ou semaines de joie intense en revoyant vos proches et en retrouvant votre vie : tout le monde vous pose des questions, vous retrouvez vos repères, vous digérez votre voyage tout en le racontant.
La durée de cette prise de recul positive et de partage de votre expérience peut durer quelques semaines comme beaucoup moins. Pour ma part, la lune de miel a du durer une dizaine de minutes : j’ai tout de suite été propulsée dans l’étape suivante, le choc du retour.
Le choc du retour, ou errance du voyageur-zombie
Le choc du retour, ou errance, est la période difficile du retour de voyage. Vous êtes complètement perturbé émotionnellement : vous êtes partagé entre la nostalgie de votre voyage, la tristesse d’avoir loupé tellement d’étapes de la vie de vos proches, vous êtes angoissé face à votre avenir professionnel et personnel…
Bref, vous avez peur de ne plus jamais vous réadapter à la vie française, et de rester cet éternel voyageur-zombie, mi-sédentaire mi-nomade, qui erre de canapé en canapé tout en ressassant des anecdotes de la vie « là-bas » et en dénigrant (intérieurement ou non) la vie en France.
Combien de temps dure le choc du retour de voyage ?
D’après l’article de l’Université de Laval, vous pouvez compter sur une réadaptation totale après 1 à 18 mois. Je ne sais pas si je trouve ça rassurant ou carrément flippant… Bon, en ce qui me concerne, la réadaptation a été finalement assez rapide. Ne désespérez pas, donc.
La réintégration, ou le renouveau
Ça y est, le traumatisme est passé : vous êtes de nouveau sur les rails d’une vie à la française – mais pas tout à fait la même que celle d’avant, puisque vous y avez intégré les enseignements de votre voyage. A ce stade, vous êtes redevenu sédentaire… Et donc, prêt pour vous lancer dans un nouveau voyage en PVT !
Les techniques pour un retour adouci
Vous l’aurez compris, vous n’échapperez pas à la déprime du retour. Mais une bonne préparation et quelques réflexes de survie pourront l’adoucir !
Lutter contre le syndrome du voyageur-zombie
Comme j’aime bien inventer des théories, j’ai créé le « syndrome du voyageur-zombie ». Il désigne le moment où vous rentrez en France et que vous êtes dans un entre-deux identitaire.
Un « voyageur-zombie » n’est plus un voyageur, ni un sédentaire. C’est une étrange créature sans entrain ni curiosité, qui ère entre sa chambre d’enfant et les canapés des copains, en se demandant constamment ce qu’il fait là. Ce syndrome peut être minimisé avec une solide préparation au retour !
Bien choisir sa date de retour
Premier élément important, pour bien vivre son retour…. C’est de rentrer au bon moment. Vous ne pouvez plus voir votre sac à dos en peinture, vous en avez assez de raconter tous les jours la même histoire dans les auberges de jeunesse et d’avoir des fringues crados, vos proches vous manquent fort, vous rêvez d’un bout de fromage ? Vous trouvez que le voyage, ça va deux minutes, mais que vous avez assez donné ?
L’idéal pour bien terminer un voyage, c’est de rentrer à ce moment-là : quand votre soif de découvertes est assouvie (temporairement), et que vous avez plutôt une soif de repères. Si vous n’avez pas de contrainte de retour, alors attendez tranquillement ce moment pour rentrer en France.
Privilégier un retour au printemps ou en été
Faites ce qu’on dit, pas ce qu’on a fait : rentrer un 24 décembre en France = grossière erreur. D’abord, parce que vous êtes en choc thermique : vous passez de 40°C à Buenos Aires, à – 8000°C en France. De l’été rayonnant, à l’hiver glauque. De la lumière à l’ombre. Ensuite, parce que commencer un retour par un marathon famille & fois gras, c’est horriblement oppressant : rester coincé à table pendant 5 h de suite avec vos proches qui vous harcèlent parce que « elle a rien mangé cette petite », c’est rarement la définition de la liberté.
Donc quand vous planifiez votre retour, soyez attentif à choisir une date propice aux retrouvailles et aux projets. Le printemps, c’est parfait, car vous êtes en plein dans l’énergie des beaux jours (donc tout le monde sort et va boire des cafés avec vous), mais aussi vous êtes en fin d’année scolaire : ça vous laisse la possibilité de réfléchir à un nouveau projet à lancer à la rentrée de septembre.
Organiser ses premiers mois en France
Pour réduire l’angoisse de votre retour en France, préparez vos premiers mois, notamment au niveaux de trois aspects : l’argent, votre lieu d’habitation, et votre activité principale (travail, études ou autre).
Préparer mon atterrissage m’a permis d’exorciser l’angoisse : je savais chez qui je dormirai les premières semaines, j’avais listé les démarches administratives que j’aurai à faire, je m’étais fixé des objectifs pour les premiers mois… Tout ça m’a mis dans un état d’esprit optimiste : à aucun moment je me suis dit que j’allais passer mon année sur le canapé de mes parents !
Questions pratiques pour un retour sans surprises
1 – Avec quel argent vais-je vivre à mon retour de voyage ?
Si comme nous, vous avez le chômage, alors pas trop d’inquiétude : il suffit de vous réactualiser à Pôle Emploi en rentrant, et hop, vous êtes de nouveau heureux bénéficiaire de l’ARE. Sinon, il faudra faire un calcul pour savoir combien de temps vous pourrez tenir avec ce qu’il vous reste d’économies… Et si vous êtes à sec, alors il vous faudra planifier de retrouver un travail illico presto !
Avant le départ : Ouvrir ses droits chômage, puis les geler
L’idéal est d’avoir ouvert puis gelé ses droits avant de partir, pour n’avoir qu’à les rouvrir en rentrant de voyage – sans avoir d’attente liée à l’inscription à Pôle Emploi. Toute la procédure d’ouverture et de gel des droits est expliquée ici.
Question subsidiaire mais non moins importante : est-ce que je vais bien être couvert par la Securité Sociale à mon retour. Avec le chômage ou un nouvel emploi, à priori il n’y aura pas de problème. Dans les autres cas, lisez notre dossier Secu !
2 – Où vais-je habiter pendant les premières semaines ?
- Si vous n’avez aucune rentrée d’argent, alors pas le choix : adoptez les canapés de vos parents, ou de vos copains. L’idéal est de faire un échange avec des copains pour qu’ils vous acceptent pendant quelques semaines : par exemple, vous restez un mois MAIS vous leur cuisinez des super trucs ou les aidez à faire de la peinture… Ça permet de se sentir plus à l’aise !
- Si vous avez quelques revenus (par exemple, si vous avez le chômage), je vous conseille de prendre un appartement, même petit : ça permet de se retrouver et de reconstruire une vie quotidienne rapidement. Ce n’est pas évident à trouver quand on n’a pas de fiches de paie, mais si vous avez au moins un garant, on est la preuve vivante qu’il existe encore des propriétaires compréhensifs qui acceptent de vous louer un studio meublé…
- Avec un peu de revenus ou de l’argent de côté, vous pouvez aussi vous tourner vers les appartements Airbnb. C’est l’option adoptée par les co-fondateurs de Kowala à leur retour du PVT Australie. C’est légèrement plus cher, mais beaucoup plus simple administrativement pour louer quelque chose. Si vous êtes hors saison touristique, ou pour louer sur une durée importante), n’hésitez pas à demander un tarif spécial au propriétaire (directement via le site). Un appartement affiché à 70€ la nuit leur a été proposé à 700€ le mois, ça vaut le coup !
- Si vous reprenez un appart’, on vous conseille d’opter pour un meublé : vous pourrez ainsi garder une liberté et une légèreté matérielle, aussi agréable qu’utile quand on ne sait pas trop ce qu’on va faire dans les prochains mois…
Pas de CDI ni fiche d’imposition, comment faire ?
Très compliqué de prétendre à une location en France sans salaire ni fiche d’imposition, même si on a l’argent ! Quelles solutions mettre en avant ? Un bon garant dans la famille pourra bien aider. Sans garant, vérifiez si vous êtes admissibles aux services d’aides à l’accès au logement Visale ou Loca-pass.
Privilégiez aussi les offres directes entre particuliers (Pap.fr, leboncoin, etc.) : les propriétaires sont bien plus enclins à comprendre votre situation qu’une agence.
Pensez enfin au solutions plus ou moins temporaires avec Airbnb, la colocation, le home-sitting, le pet-sitting, le helpx, etc.
3 – Activités : Que vais-je faire pendant les premiers mois ?
C’est la question centrale : car quand on rentre de voyage sans avoir d’emploi, c’est invariablement le moment où on se demande ce qu’on va faire de notre vie. Parfois à l’extrême : ce sont les moments où on raconte à tout le monde qu’on va aller élever des lamas au Pérou, ou faire du pain en Patagonie.
Pour structurer un peu tout ça, quelques idées et conseils :
- Listez toutes vos envies, et essayez de voir celle(s) qui sont le plus réalistes et/ou réalisables à court terme. Ça vous aidera à partir dans une direction, ou une autre.
- Faites un bilan pro. Il y a plein de moyens : tout seul (il existe plein de livres pour faire son auto-bilan de compétences), ou accompagné avec des dispositifs comme le CEP.
- Profitez de Pôle Emploi : ils pourront par exemple vous proposer un bilan de compétences, une formation…
- Pour trouver un petit boulot temporaire sans trop de pression, faites tourner un mail auprès des amis en expliquant que vous cherchez des petites missions. Pour moi, ça a marché !
Ne restez pas inactif !
L’erreur à ne pas faire, c’est rester inactif, et sombrer lentement dans la solitude et la déprime. Vous pouvez reprendre un petit boulot, ou du bénévolat, ou aider vos proches dans leur projets de peinture – jardinage – cuisine – construction… Ça vous permettra de retrouver un rythme (même si ce n’est pas à plein temps), et de ne pas être en décalage total avec les autres.
Rien ne sert de courir : prenez le temps de l’adaptation
Il est important d’organiser votre retour de voyage… Mais aussi, de vous laisser un temps de liberté ! Inutile de vous forcer à postuler pour un boulot en CDI la semaine de votre retour si vous n’en avez pas envie…
Pour moi, le secret d’un retour en douceur, ça a été de se réintégrer (reprendre un appartement, des activités, un rythme), tout en se laissant une « légèreté psychologique ». Par exemple, en louant un meublé plutôt qu’un appartement vide (ce qui vous laisse la liberté de vous en aller à tout moment), en faisant du tri dans mes affaires pour rester matériellement libre, en travaillant à droite à gauche sans m’engager sur le long terme…
Et surtout, soignez-vous. Pendant ce moment d’entre-deux, prenez le temps de profiter de tout ce qui vous a manqué en voyage : vos amis, les plaisirs de la vie sédentaire, votre ville…
Dresser la liste des petits bonheurs sédentaires
Durant les premiers jours de votre retour, dressez les petits bonheurs de la vie sédentaire. Vous découvrirez au passage des fantasmes de sédentarité bizarres : les premiers jours, j’avais par exemple un bonheur extrême à laisser ma brosse à dent sur le lavabo pendant plusieurs jours, ranger mon livre sur une étagère ou préparer une soupe en écoutant la radio…
Résumé : nos conseils pour bien vivre son retour de voyage
Préparez votre retour
- Choisissez bien votre date de retour : si possible, ne pas planifier votre retour avant d’avoir envie de rentrer. Mais si vous êtes obligé de planifier, alors essayez de rentrer au printemps ou en été.
- Préparez votre retour : en fonction de vos ressources, planifiez ce que vous allez faire et là où vous allez habiter, au moins pour les premiers mois.
- Prévoyez vous quelques semaines pour souffler en arrivant : revoir vos proches, vous reposer… Mais limitez cette période de farniente à un mois seulement.
Installez-vous, mais restez libre !
- Reprenez un appart’ et une activité (même bénévole) dès que vous rentrez : ne vous laissez pas contaminer par le syndrome du voyageur-zombie, mi-sédentaire, mi-nomade qui traine sa carcasse déprimée de canapé en canapé.
- Si vous pouvez, louez un appartement pour renouer avec une forme d’intimité. L’idéal est de louer un meublé, pour garder une liberté.
- Faites du tri dans vos affaires, pour garder un mode de vie minimaliste. Vous verrez qu’après un an de sac à dos, ouvrir les cartons faits avant de partir occasionne tout un tas de questions : pourquoi, déjà, avais-je jugé qu’avoir douze paires de chaussures était utile ? Profitez de ce détachement matériel pour faire un grand tri : vendez des choses sur Vinted et Leboncoin, ou donnez des choses à la ressourcerie !
Profitez des avantages de la France
- Entourez-vous : voyez vos amis, votre famille !
- Faites une liste des petits bonheurs sédentaires. Par exemple, je me souviens encore de l’émotion que j’ai eue quand, avec Romain, on a mis notre premier fromage dans le frigo de notre appartement… Bon, maintenant, on n’a plus d’émotion à chaque fois qu’on met un truc au frigo, mais sur le coup, ça fait plaisir de relever ce genre de petit bonheur sédentaire !
Continuer à découvrir et voyager
- Visitez et faites des voyages… Mais près de chez vous : un road-trip dominical à la mer ou deux jours de rando, des vacances en stop-tente-sac-à-dos, voire, faites une expérience de volontariat près de chez vous ! Vous comprendrez ainsi que l’aventure n’est pas seulement à l’autre bout du monde : elle peut être aussi au bout de la rue.
- Gardez un lien avec le pays dans lequel vous avez voyagé. Si votre pays d’expatriation ou de PVT vous manque, trouvez des personnes originaires de ce pays pour discuter. C’est ce que ma copine Charlotte a fait en rentrant de PVT Argentine : elle a cherché sur Facebook des groupes d’Argentins, et se fait maintenant régulièrement des matés à Marseille, tout en entretenant son espagnol.
- Ne vous mettez pas de limites ! Le mieux pour vous est peut-être de changer complètement de carrière, ou de repartir pour une nouvelle aventure (pour ça le nombre de destinations PVT ne manque pas!)
Laissez le temps faire son travail
Même si vous appliquez tous ces conseils à la lettre, vous ne pourrez pas échapper au blues du retour. Acceptez-le, exprimez-le, partagez-le en commentaire… Et attendez patiemment que le temps fasse son travail !
Quelques ressources bien utiles pour digérer le retour
- L’article Séjour à l’étranger : le choc du retour écrit par le psychologue Marc Bernier est assez bien fait.
- Le premier épisode du podcast ExExpat compile des récits de voyageurs sur le choc du retour. Une bonne ressource pour se sentir moins seul !
- La communauté du Retour en France ainsi que le très complet Guide du retour en France : une bible pour l’accompagnement psychologique et pratique au retour dans son pays !
Tout cela nous parle beaucoup. Après 6 mois en Asie du Sud Est, le choc du retour était brutal ! 10 mois après, l’envie de repartir au long cours reste toujours là. On ne le dit effectivement pas assez : le retour fait partie intégrante du voyage. On s’en est rendu compte dès notre arrivée et nous ne nous étions pas préparés à cela. Alors…on écume les Apéros Voyage qui fleurissent un peu partout et on pense…à nos futures destinations ! Merci pour le partage.
Merci à toi pour ton commentaire !
Oui, effectivement, je pense que c’est un passage obligé… Mais le point positif, comme le dit Pierre dans l’article, c’est que c’est aussi ce moment un peu dur qui permet de se rendre compte de ce qu’on a vécu.
Pour moi, même si ça a été un peu violent, le fait de le préparer et de voir tous les avantages de la sédentarité m’ont vraiment permis de mieux le vivre ! La prochaine fois, j’éviterai juste de rentrer un 24 décembre… (angoisse ?)
Bons prochains voyages et retours donc !! :)
Un retour le 24 ? Waouwww! Tu aimes le risque !!! Nous, c’était au Printemps pour éviter d’avoir trop froid ! Ha, ha… Merci, bons futurs trip a toi aussi